samedi 22 mars 2014

Electroma (2006)



Dans un monde où l'être humain a laissé place à des humanoïdes aux casques dorés, deux robots partent en quête d'humanité à travers le désert. A la recherche d'une autre forme d'existence, les deux êtres croient trouver en la pose d'une visage humain le commencement d'une nouvelle vie.....

Questionner. Tel peut être le verbe résumant à lui seul la carrière du groupe d'électro le plus talentueux. La musique des Daft Punk est à l'image du film. Chaque album du groupe français est un questionnement sur la musique et son adaptation à l'électro. Le travail notamment autour du Disco de Random Access Memories en est un parfait témoignage...

Mais trêve de bavardage, Daft Punk, qui réalise un film ça donne quoi ? 

 Il est ici tout d'abord à souligner la démarche de la réalisation d'un tel projet. Le groupe français prends le cinéma pour ce qu'il est à la base, un art. Et ce n'est pas à l'heure des superproductions sponsorisées par Coca-Cola ou Hollywood Chewing-gum  qu'on s'en plaindra. Il y a un pur esprit indé qui saupoudre le film. Les deux réalisateurs font une oeuvre pour rendre hommage au cinéma mais également pour se faire plaisir à travers un sujet qui les concerne, en l’occurrence l'avatar robotique. Il aurait été cependant facile pour le groupe de surfer sur sa popularité afin de rendre un produit commercial bâclé, il n'en est rien. 

La mise en scène est épurée au maximum. Aucun dialogue, des plans séquences plongés dans le silence, des paysages superbement survolés pendant de longues minutes, un rythme lent... Voila les ingrédients qui font de cette réalisation une oeuvre à part. Chaque plan est travaillé au maximum, bien évidemment, on tombe ici dans le contemplatif et on ne se laisse pas aller au jeu facile de l'action esthétisée. Ça peut dérouter le spectateur se trouvant devant une oeuvre aux antipodes de ce qu'il connait. Et encore une fois la démarche est à saluer. Le rendu est esthétique, certes lourd et pesant, mais certains plans frôlent pour moi l'excellence et ils ne font que soutenir le propos du film.

Electroma se veut comme un véritable plaidoyer à l'humanité. Par le biais d'une société de robots portant tous les mêmes casques, les réalisateurs questionnent la notion de normalité dans notre société actuelle. Sommes nous tous en fin de compte que des machines asservies et obéissant à un rythme de vie  abrutissant ? De la normalité, Electroma questionne également sur l'anormalité et de sa perception par la société. On peut voir dès que ces deux êtres partent en quête d'humanité par la pose d'un "masque" humain ( voir deux robots avec des têtes de Dan Akroyd et John Turturro a de quoi choquer certes...), la société normalisée les rejette et exclue ce qui est différent... Alors oui le propos est assez simpliste, mais se servir du concept de robot, procédé certes peu novateur, est une chose intelligente faisant clairement passer le message. 

D'autant plus que par la force de la mise en scène et de la bande son, les Daft Punk réussissent à humaniser ce qui n'est, à la base, que froid et sans expression. Contrairement aux autres protagonistes du film, les deux robots font passer des émotions, comme si cette quête d'humanité commençait à les dissocier et à les rendre plus humains dans le film, mais également aux yeux des spectateurs.

Enfin un petit mot sur la bande sonore. Evidemment on pouvait se demander si le groupe allait parsemer de sa french touch leur première réalisation. Et bien à la surprise générale il n'en est rien. Haydn, Allegri, Tellier, Mayfield... ils sont tous là sauf les Daft Punk et je pense que ceci est un bon argument pour tordre le coup aux critiques sur une possible démarche égocentrique des deux musiciens. Le film est un hommage au cinéma et non un clip promotionnel d'une heure où l'on enchaîne les mixs et compositions originales. La démarche est judicieuse et renforce justement l'aspect purement cinématographique d'Electroma.

Le film risque d'en dérouter plus d'un. Electroma est conceptuel, il dérange clairement, autant sur la forme que sur le fond. Alors oui, on peut encore dire ( comme je le fais souvent ) " oui mais c'est encore un truc pour les bobos de la capitale qui veulent se palucher en se la jouant exception culturelle". Et bien personnellement je ne dirais pas la même chose.

 Bien évidemment je ne conseillerais pas le film au grand public en disant qu'ils vont se régaler pendant une heure, mais l'oeuvre peut se laisser savourer si l'on possède quelques clés pour la déverrouiller et la laisser parler. Ma clé a été la musique des Daft Punk. Comme évoqué en début de chronique, le film est à l'image de la production musicale du groupe, une composition artistique avec une esthétique soignée qui bouscule les codes établis. Je m'attendais à une oeuvre différente et je n'ai pas été déçu.

Alors oui on peut reprocher plein de choses à l'oeuvre. Egotrip au rythme lent, absence de dialogues, histoire sans grand intérêt... Pourtant Electroma doit se laisser apprécier comme une oeuvre à part entière, un film qui questionne, bouscule et dérange les robots que nous sommes après tout...

C'est pour qui ? 

Pour les fans de Daft Punk évidemment
Pour les amateurs de réelles expériences cinématographiques
Pour les fétichistes des casques de motards
Pour les taiseux
et c'est pas pour les fans de Martin Garrix...

Galerie photos : 










Le film :







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