dimanche 20 janvier 2013

99 francs ( 2007 )




Octave est publicitaire pour le compte de la Ross&Witchcraft. Trentenaire branché, déluré, irresponsable et addict à la coke, il fait la pluie et la beau temps sur le marché publicitaire par le biais de slogans chocs. Jusqu'au jour où, subitement, quelque chose ne tourne plus rond, le deuxième effet kiss cool de cette vie sniffée donne subitement mal au crâne . Madone, pdg qui fait son capital dans le monde du yaourt 0%, décide de contrecarrer le génie d'Octave et celui de son acolyte Charlie, en renvoyant leurs brillantes idées au placard. Pour décrocher le marché de l'allégé, il faut penser autrement et rapidement, la survie de la boite en dépend. Poussé dans ses retranchements, le génial publicitaire sombre peu à peu. Sa rencontre avec la belle stagiaire, Sophie ne va en rien arranger sa situation. Sans exutoire, une seule solution : tout foutre en l'air...

" Jamais crétin et irresponsable n'a jamais été aussi puissant que moi depuis 2000 ans ". Cette seule phrase peut résumer l'essence même de 99 francs. Le film est une adaptation éponyme du bestseller du plus branché des écrivains, Frédéric Beigbeder. Connu pour ses frasques et sa vie tumultueuse, l'auteur voit une partie de son ancienne vie de publicitaire mise brillamment en scène par le réalisateur néerlandais, Jan Kounen. Déjà adepte de films délirants tels que " Doberman '', le cinéaste apporte son grain de folie à une histoire déjantée et sublimée par une touche graphique pop-fluo efficace.

Cette patte graphique est l'un des atouts majeurs de la réalisation. Le spectateur est plongé dans un décor coloré aux reflets cartoonesques. La mise en scène est efficace et clairement inventive, ce qui apporte une réelle identité à 99 francs. Par mémoire d'amateur des toiles, ce n'est que très rarement que j'ai pu apprécier une  mise en scène aussi inventive et efficace. Tout ce travail permet une immersion immédiate dans le petit monde branché et "cocainé" de la publicité. La danse délurée de Dujardin et Giocante sur fond d’échographie saupoudrée de David Guetta doit se laisser déguster comme un véritable petit bijou de créativité. Et ce n'est là qu'un des nombreux exemples que j'aurais pu citer.

Sous ses allures d'expérience cinématographique, le film est toutefois un véritable brulot réussi envers le monde de la publicité dénoncé dans tout son cynisme et sa monstruosité. En ce sens, le sabotage organisé par Octave s'impose comme un réel moment de jouissance pour le spectateur qui participe directement à une des plus belles vengeances jamais filmées.

Néanmoins, l'inventivité ne suffit pas si elle ne sert pas une narration efficace, ce qui est le cas ici. Reprenant assez fidèlement celle du roman original, l'histoire se pose clairement comme une sorte de conte cruellement réaliste. La scène d'intro ( qui débute par la fin du film ) est en ce sens clairement réussie et donne envie d'en savoir directement plus. Bien que souvent critiquée, je trouve cette façon de faire terriblement efficace. Il n'y pas meilleur moyen pour accrocher le spectateur que de lui donner envie de découvrir ce qui amène à cette fin. En ce sens, on peut faire un parallèle évident avec le chef d'oeuvre d'Orson Welles Citizen Kane et sa scène d'introduction, mythique.  La fin a également de quoi surprendre et soutient encore plus la force onirique du film. On  nous laisse clairement le choix entre deux issues  : tragique ou heureuse. Cette idée originale et clairement bien fichue permet également de questionner directement le spectateur sur le sort qu'il veut réserver à cet héros arrogant mais néanmoins attachant.

L'autre ingrédient du succès est l’interprétation d'un Jean Dujardin impeccable en publicitaire cynique en quête de liberté. Adoubé par l'écrivain sur tous les plateaux télés, l'acteur francais oscarisé démontre encore ici tout son potentiel d'acteur en interprétant brillamment  un personnage de tragédie comique moderne. Toujours dans le ton juste, il permet de rendre crédible un personnage fantasque et décalé comme l'est Beigbeder. A noter par ailleurs, le petit cameo réussi de l'écrivain déjanté. Le reste de la troupe d'acteurs n'est pas en reste, en notant la prestation de premier plan de deux acteurs de choix. Jocelyn Quivrin est parfait dans un rôle d'un assistant complètement déjanté, Nicolas Marié est quand à lui détestable à souhait dans le rôle d'un pdg avide aux reflets inhumains.

99 francs est clairement l'un des films francais les plus réussis de ces dernières années. Cela tient tout d'abord à son gros travail graphique mais également à son sujet, brillant et porté à l'écran par une bande d'acteurs en pleine forme. Saupoudré de quelques répliques acerbes et décalées, le film de Jan Kounen doit être découvert et apprécié à sa juste valeur. Brulot réussi contre le monde de la publicité, ce conte moderne aux antipodes d'une cinéma francais manquant bien souvent de créativité porte bien haut la maxime de Joe Paterno " La publicité est comme le poison, elle n'est dangereuse qu'avalée ".


C'est pour qui ?

Pour les mecs aux cheveux longs
Pour tous les fans de Dujardin et du regretté Jocelyn Quivrin
Pour ceux qui n'aiment pas l'odeur de la choucroute
Pour ceux qui rêvent de tout envoyer en l'air
et c'est certainement pas pour les hamsters

Galerie photos : 






Extraits du film : 

 







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